Toopi Organics décroche une aide de 3,8M€ pour collecter et valoriser l'urine - Premium

Utiliser l’urine humaine comme support de culture pour faire pousser des bactéries d’intérêt agricole, cela peut paraître avant-gardiste. Pourtant, c’est le projet que porte la startup girondine Toopi Organics depuis deux ans. Lancée par Michael Roes et Pierre Huguier, elle est aujourd’hui soutenue par l’ADEME (agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie) grâce à un contrat à impact de 3,8 millions d’euros. Aujourd’hui 22 personnes travaillent dans l’entreprise, qui commercialisera d’ici 2022 son premier produit.Un constat environnemental sans appel « En 2019 j’avais une société de fabrication de biostimulants à base de plantes, explique Michael Roes. Je connaissais donc le milieu de l’agriculture et on m’a parlé par hasard du sujet de l’urine. Je me suis aperçu, à 30 ans, que l’on consomme plusieurs litres d’eau potable à chaque fois que l’on va aux toilettes. Il faut savoir que 30% de la consommation d’eau potable des ménages sert à tirer la chasse, c’est de la folie ! » Stress hydrique, difficultés de traitement des polluants présents… Pour le chef d’entreprise, il n’en faut pas plus pour se lancer dans l’aventure Toopi Organics. « Surtout, rajoute-t-il, avec mon ancienne entreprise je constatais que l’agriculture manque de solutions techniques et économiquement viables pour effectuer sa transition environnementale. » Michael Roes commence ses recherches, analyse la composition de l’urine humaine, et s’aperçoit que ce liquide peut servir d’engrais mais ne tient pas économiquement. « En travaillant un peu j’ai constaté que ça peut être un bon support pour faire pousser des micro-organismes. Potentiellement, il y avait une clef pour en faire un produit avec assez de valeur ajoutée pour atteindre des marchés conséquents. »Le premier produit commercialisé en 2022 Développement puis amélioration du procédé de traitement, dépôt du brevet, recherche des premiers financements… La première année est chargée pour les cofondateurs. En 2020 Toopi Organics réalise une première levée de fonds d’un peu plus d’un million d’euros, de quoi donner un vrai coup de pouce à la startup, qui a devant elle de 6 à 10 ans de R&D. « C’est un processus long car nous développons une gamme complète de produits, précise Michael Roes. Nous en avons déjà un premier finalisé qui sera commercialisé, si tout se passe bien, début 2022. Nous attendons seulement l’autorisation de mise sur le marché. » Pour arriver à un produit commercialisable l’urine doit être préalablement mise à bonne température, enrichie en sucre, puis elle reçoit un inoculum de la bactérie souhaitée. Une période de fermentation est aussi nécessaire, pour obtenir le résultat final. Il est ensuite conditionné dans des cuves de 1.000 litres, avant d’être vendu. « Notre premier produit contient des bactéries ayant la capacité de rendre disponible, pour les plantes, le phosphore contenu dans le sol. En Europe les sols sont saturés en phosphore mais ce dernier est sous une forme non assimilable pour les plantes, qui nécessitent de l’engrais. »Les urinoirs installés ne consomment pas d'eau potable - Crédits Toopi OrganicsMaîtriser les coûts de production La gamme que développe Toopi Organics vise à attaquer tous les marchés clefs de l’agriculture : l’azote, le potatium, les insecticides, fongicides et herbicides. « Tout cela, précise Michael Roes, avec des coûts de production moindres. Nous voulons proposer des produits totalement naturels au moins aussi efficaces que les standards actuels du marché, pour un coût inférieur. » Car si la startup veut avoir un impact environnemental majeur, elle doit proposer un rapport qualité/prix excellent. « On s’attaque à des marchés qui fonctionnent extrêmement bien, qui sont très efficaces et ne coûtent pas cher. D’où leur utilisation massive. » Pour devenir rentable, Toopi Organics affine actuellement sa stratégie économique. « Nous avons plusieurs perspectives, détaille Michael Roes. La vente de produits à des distributeurs, mais aussi la vente de licences technologiques à des acteurs ayant déjà des volumes d’urines, dans d’autres pays notamment, et enfin des modèles de sociétés à capitaux partagés. Typiquement en régie publique pour des collectivités. »3,8M€ d’aides pour collecter les urines Pour aider Toopi Organics dans son développement, l’ADEME vient de lui octroyer 3,8M€ d’aides sur cinq ans, sous la forme d’un contrat à impact : un investisseur privé, en l’occurrence BNP Paribas, porte le risque et avance l’argent à la startup. Ensuite sur critères d’impact, l’ADEME rembourse le financeur. « Ces critères vont être le nombre de litres d’eau économisés, le nombre de litres d’urine recyclés, la quantité d’engrais remplacée, énumère le cofondateur. C’est un contrat tripartite. » Cette somme aidera la jeune pousse à assurer la sécurité de la collecte d’urines. Car pour se développer, elle doit recevoir ce liquide de façon régulière et en grosse quantité. Ici, un litre d’urine collecté permet la fabrication d’un litre de produit. Les équipes se fixent comme objectif la collecte de 2,5M de litres d’urine en cinq ans et pour cela, ce sont les établissements recevant beaucoup de monde qui sont visés : lycées, collèges, stations-services ou encore stade. « Grâce à l’ADEME nous allons pouvoir auditer les bâtiments, faire intervenir un bureau d’étude, puis modifier les urinoirs pour qu’ils ne consomment pas d’eau et soient équipés d’une cuve de stockage.La startup collecte déjà l’urine dans un stade de rugby, une entreprise et quatre établissements scolaires à La Réole, en Sud Gironde. Toopi OrganicsBasée à Loupiac-de-la-Réole22 salariésCA : nulwww.toopi-organics.com

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