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Pôle Emploi Gironde : « Les entreprises sont plus ouvertes qu’auparavant »

Écosystème
mardi 26 avril 2022

Comment pallier les difficultés de recrutement des entreprises ? Tout au long de la semaine, Placéco donne la parole à des acteurs girondins qui s'efforcent de faire bouger les lignes.

Nicolas Moreau, directeur territorial Gironde de Pôle Emploi (MP).

Premier témoin des besoins et difficultés de recrutement des entreprises, Nicolas Moreau, directeur territorial Gironde de Pôle Emploi, analyse les bouleversements à l’œuvre sur le marché du travail.

Comment expliquez-vous la difficulté pour certaines entreprises de trouver des candidats ?
Elle est liée à une forte hausse des offres d’emploi alors que le nombre des demandeurs d’emploi a baissé sur un an, en Gironde, de 8,5 % à fin décembre 2021. Nous avons atteint un taux de chômage historiquement bas à 6,7%. De plus, la crise sanitaire a généré chez certains demandeurs d’emploi une réflexion personnelle sur son parcours de vie, des envies des réorientation. On l’a vu dans l’hôtellerie-restauration, avec une partie des équipes qui n’ont pas été là au moment de la reprise. Certains se sont dit : est-ce que j’ai envie de reprendre dans les mêmes conditions qu’avant ? Il y a eu beaucoup de changements dans les comportements professionnels. Cela a créé parfois une inversion. Auparavant, l’entreprise choisissait le candidat, désormais avec les tensions, c’est le candidat qui choisit et le chef d’entreprise doit se vendre, attirer, d’où l’importance de la marque employeur, des sites de référencement où les candidats vont vérifier la réputation de l’entreprise, de la politique RSE de l’entreprise, de la possibilité ou non de télétravailler…

Est-ce que cela a conduit les entreprises à changer leur stratégie de recrutement ?
Il y a en effet une tension sur le marché du travail qui s’accroit et la nécessité de pouvoir inventer de nouveaux moyens de recrutement. On remarque tout d’abord que davantage d’entreprises viennent vers nous qu’avant. Mais souvent, effectivement, elles font appel aux entreprises de recrutement temporaire -quasi un emploi sur deux se fait comme ça-, à des cabinets externes pour des postes qualifiés, aux réseaux sociaux... La multiplicité des canaux n’est pas un problème. Elles s’ouvrent à toutes ces techniques. On a aujourd’hui un écosystème le plus ouvert possible.

Les entreprises modifient-elles également leurs critères de recrutement ?
En effet, elles ouvrent aussi leurs critères de recrutement à des publics qui sont moins employables habituellement. Certaines n’ont pas le choix. Il y a donc une évolution, de gré ou de force et de fait les entreprises sont ainsi plus ouvertes qu’elles ne l’étaient auparavant. On le voit par exemple sur l’accueil des stagiaires. Pôle Emploi travaille ainsi sur l’accompagnement des publics éloignés de l’emploi, avec le CEJ, le Contrat Engagement Jeune, démarré depuis un mois et demi et à travers des accompagnements pour les chômeurs de très longue durée. Il y a aussi des outils financiers qui viennent les pousser dans ce sens, des aides à l’embauche, des contrats aidés, des primes exceptionnelles pour l’alternance, des coups de pouce pour donner envie.

Est-ce que le manque de candidats peut être dû à une méconnaissance de certains métiers ?
Oui, cela joue. Il peut y avoir des a priori, comme dans l’industrie, avec des images datées des années 50, de métiers qui seraient très durs… Il peut y avoir une méconnaissance ou peu d’orientations des jeunes vers ces métiers. Mieux les faire découvrir est une solution face au manque de candidats. Nous avons ainsi à Pôle Emploi un outil de découverte des conditions d’exercice d’un métier qui fonctionne bien. Les entreprises, prêtes à faire découvrir leurs métiers et les candidats peuvent entrer facilement en relation sur le site « immersion facile ». Le candidat, qui n’est pas rémunéré par l’entreprise mais qui continue à toucher ses allocations chômage, peut s’immerger dans l’entreprise durant une ou deux semaines pour découvrir le travail dans un Ephad, un hôpital, les vignes, une ligne d’embouteillage… C’est mieux que tous les discours. Nous proposons aussi deux dispositifs de formation avant embauche, généralement d’un mois mais qui peut aller jusqu’à 800h, la POE, Préparation Opérationnelle à l’emploi et l’AFPR, Action de Formation Préalable au Recrutement. Ces deux outils peuvent aider les recruteurs.

Ont-ils été activés pour répondre aux tensions actuelles du marché du travail ?
Ils existaient déjà mais le problème est que les entreprises ne les connaissent pas toujours. En cette période de tension, ces dispositifs ont ainsi été dotés de moyens financiers supplémentaires. Par ailleurs, Pôle Emploi développe de nouvelles méthodes de recrutement par simulation pour tester l’habilité d’un candidat sur un poste, le geste technique mais aussi des compétences telles que la gestion du stress, la capacité à travailler en équipe… Il y a également l’organisation de semaines dédiées à tel ou tel secteur ou métier, des jobdating, du sourcing pour de la formation… Outre le recours aux réseaux sociaux, on développe les outils digitaux. Il y a eu des salons de recrutement virtuel, le lancement de web-séries, tous nos sites en Gironde sont équipés de casques virtuels présentant 14 métiers, certains locaux comme à Bordeaux-Saint Jean propose un simulateur de conduite pour tester les conditions d’exercice des chauffeurs poids lourds…

Au-delà des méthodes mêmes de recrutement, les entreprises, pour être plus attractives, initient-elles des mutations plus profondes sur les salaires ou les conditions de travail ?
On peut constater en effet par exemple que la part de demandes d’emplois saisonniers est en baisse de 4%, ce qui montre que les recruteurs ont conscience, dans le contexte actuel, de l’importance de proposer, des contrats plus longs et pérennes. Certains secteurs, très en difficulté, s’interrogent. Dans l’hôtellerie-restaurant où les rythmes de travail sont compliqués, l’Umih par exemple réfléchit à revoir les salaires mais aussi à améliorer les conditions de travail avec des journées plus complètes, la possibilité de tourner à deux équipes, la création de comités d’entreprises partagés… Certains secteurs jouent sur la possibilité de pouvoir télétravailler, d’autres sur l’amélioration de l’ergonomie, des aménagements de postes, de la pénibilité de la production… Dans le secteur des services à la personne, il est proposé plus fréquemment des véhicules, des contrats de travail plus denses en termes d’horaires. La vigne travaille aussi sur les conditions de travail, avec des tracteurs plus confortables, plus de protection phytosanitaire…Tous ces éléments bougent.

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