Biotech : OP2 Drugs, de l'infarctus à Kawasaki - Premium

Si la création de la biotech OP2 Drugs remonte à 2015, son histoire prend racine en 2010 lorsque Frédéric Marin, son fondateur, se penche sur une molécule : OP 2113. « Je passais beaucoup de temps à rencontrer, échanger avec des gens, se remémore-t-il. J’ai rencontré une personne qui m’a raconté une histoire un peu loufoque : celle de son chat, malade et qui aurait dû mourir. Cette personne l’a traité avec un comprimé acheté en pharmacie, et le chat a finalement vécu une longue vie. » Frédéric Marin s’interroge alors. Pourquoi le chat a-t-il survécu, et comment cette molécule a-t-elle pu l’aider ? « J’ai un tempérament impatient et pour aller vite dans le domaine des médicaments il n’y a pas 36 solutions, on n’a rien inventé de mieux qu’un repositionnement. Comme l’aspirine, qui est un fluidifiant sanguin, un anti-inflammatoire, qui sert à lutter contre la migraine… » Le scientifique se demande alors si la molécule OP 2113 peut être intéressante dans la médecine humaine. Il la transmet à un laboratoire bordelais, et après deux ans de recherche, les premiers résultats tombent. « Le chercheur du laboratoire nous a expliqué que le produit avait un usage jamais décrit avant, il pourrait aider les patients victimes d’un infarctus du myocarde. »Éviter les dommages liés aux infarctus En Europe comme aux Etats-Unis, chaque année, environ 200 000 personnes sont atteintes d’un infarctus sévère. Cette maladie bouche les artères coronaires et le cœur est asphyxié, ce qui provoque d’importants dégâts sur les organes. Or, lorsque le malade est conduit à l’hôpital et que le médecin débouche l’artère touchée, cela provoque aussi d’importants traumatismes. « Les coronaires sont comme des "pipelines", schématise Frédéric Marin. Lorsque le cœur est de nouveau irrigué, les cellules produisent ce qu’on appelle des radicaux libres. Ce sont des structures chimiques instables, mises en cause dans le vieillissement, les phénomènes dégénératifs… Et entre autres dans ce phénomène de reperfusion. » D’abord intégrée à la plateforme technologique d’innovation biomédicale de Bordeaux, OP2 Drugs rejoint l’Institut hospitalo-universitaire (IHU) Liryc, spécialisé en cardiologie. L’équipe travaille alors sur différentes espèces animales pour tenter d’identifier au mieux ce que la molécule OP 2113 fait, ne fait pas, et surtout, comment elle peut aider les malades. « Nous avons découvert qu’elle protège les cellules du cœur et évite la nécrose, reprend le scientifique. Aujourd’hui, si un tissu est abîmé, on ne peut rien faire à part préserver le cœur en le préservant de l’effort. Or, notre petite molécule, si on l’injecte au moment où on débouche les artères, permet de réparer ou d'éviter les dommages. »Rassurer les investisseurs avec Kawasaki Fort de cette découverte, l’équipe de la biotech suit un parcours classique entre 2017 et 2019 pour arriver à l’autorisation de mise sur le marché du médicament. Elle se rapproche de la FDA, l’agence des médicaments américaine, et va jusqu’à la programmation de la phase III de ses recherches. « Il s’agit de la dernière étape pour développement un médicament, précise Frédéric Marin. La phase I est réalisée avec des volontaires, la phase II sert à mesurer l’efficacité du produit, et la III a vocation à comparer ces effets avec un placebo, pour être certain de l’efficacité du produit. » Là, OP2 Drugs est confrontée à un manque de financement. Les recherches nécessitent 50 millions d’euros, une somme conséquente qu’elle ne parvient pas à réunir. « Historiquement, la cardiologie est perçue comme très compliquée et durant des années on n’a identifié aucun nouveau produit pour protéger le muscle cardiaque. Les industriels ont quitté le domaine. » L’année 2020 arrive alors, et entre manque de fonds et période d’incertitude économique, la biotech décide de prendre du recul, et, pourquoi pas, se recentrer temporairement sur des maladies mieux perçues par les investisseurs. Comme les maladies orphelines, touchant très peu de malades mais avec des médicaments dont le prix est plus élevé. « Un investisseur n’est pas toujours un philanthrope, et le prix du médicament ainsi que la garantie d’une période d’exclusivité sont des arguments auxquels il est sensible », commente Frédéric Marin. OP2 Drugs travaille donc, désormais, sur la maladie de Kawasaki. Une infection virale dont peuvent souffrir les enfants, entrainant des conséquences cardiaques pouvant aller jusqu'au décès. « Si la molécule OP 2113 est cardioprotectrice pour les personnes âgées faisant un infarctus, elle peut aussi l’être pour les bambins », explique le scientifique. Aujourd’hui, la société est en phase de discussion avec la FDA, et va lever des fonds, aux Etats-Unis mais aussi en Europe. Frédéric Marin espère pouvoir aller « au bout », jusqu’à la commercialisation du médicament sur la maladie de Kawasaki, pour pouvoir prouver son effet. « C’est une bonne façon d’ôter les risques, en même temps on répond à un besoin médical, et c’est une opportunité d’intéresser les investisseurs. Ensuite, nous pourrons revenir à l’infarctus. »OP2 DrugsBasée à Pessac5 salariésSur le sujet, voir aussi : Le Prix EY de l’Entrepreneur de l’Année met le focus sur l’engagement

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