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Acheter un vélo en libre-service : l’étonnant modèle de Pony

Demain
jeudi 18 mars 2021

Clara Vaisse et Paul-Adrien Cormerais, cofondateurs de Pony, avec leur vélo 2 places - photo AL

Rare acteur français sur le marché en plein essor des trottinettes et vélo en libre-service, Pony a installé ses activités de développement produit à Bordeaux et se prépare à candidater pour un déploiement à l’échelle de la métropole. Accompagnée depuis peu par Aquiti Gestion, la startup prend le contrepied de ses concurrents internationaux avec un modèle de développement inédit : elle propose en effet aux particuliers d’acquérir ses engins en libre-service. Explications.

Avec seulement 3 millions d’euros levés depuis sa création, Pony fait figure de petit Poucet face aux géants Lime, Uber ou Bird, dont la valorisation se compte en centaine de millions, voire en milliards de dollars. La startup française, qui propose des vélos et des trottinettes électriques peut toutefois s’enorgueillir d’une présence de plus en plus visible sur le marché : déjà présente à Angers, sa ville d’origine, Bordeaux et Oxford, elle vient de remporter l’exclusivité du marché du vélo en free floating à Grenoble. D’abord évincée de l’appel d’offres lancé par la ville de Paris pour le marché des trottinettes électriques, Pony vient également d’obtenir l’autorisation d’y déployer 500 vélos. La startup prévoit ensuite d’essaimer à Bruxelles au printemps, puis à Lisbonne au mois de mai.

Et Pony, confiante, n’entend pas s’arrêter en si bon chemin. « Nos premières expériences nous ont montré qu’il ne suffisait pas d’arriver en déversant des centaines de véhicules pour verrouiller un marché. Il y a toujours de la place pour un nouvel entrant si son modèle est bon », estime Paul-Adrien Cormerais, cofondateur de Pony avec Clara Vaisse. L’explosion en plein vol de géants comme le chinois Ofo et les accidents de parcours rencontrés par les grands acteurs américains du secteur dans leur développement agressif rappellent en effet que la rapidité de déploiement ne suffit pas forcément à s’installer dans la durée, même si Lime vient de revenir à Bordeaux

Plutôt que de rebadger du matériel à bas prix, Pony choisit de lancer son offre avec un vélo mécanique joli, coloré et surtout conçu pour résister aux outrages du libre-service. Inauguré à Angers fin 2017, il trouve rapidement son public, à tel point que certains usagers se rapprochent de la startup pour en acquérir un exemplaire. Pour les fondateurs de Pony, c’est un déclic : « on s’est rendu compte qu’on pouvait impliquer les usagers, et les amener à ne pas être dans une simple logique de consommation de service ».

Adopt a Pony : financement collaboratif de la flotte

Pony développe alors ce qui fait la spécificité de son modèle : une offre d’achat de véhicule en libre-service baptisée Adopt a Pony. Celui qui achète un vélo ou une trottinette en libre-service est invité à le laisser à la disposition des autres utilisateurs. En échange, il accède gratuitement à l’ensemble de la flotte, et perçoit une commission de 50% sur tous les trajets payants réalisés à l’aide de son véhicule. Pony assure de son côté la maintenance et les réparations, exactement comme pour la flotte gérée en propre par la société.

La propriété d’un véhicule en libre-service prend une dimension ludique : depuis l’application mobile, on peut nommer son Pony, suivre ses déplacements, le privatiser temporairement, vérifier la régularité de l’entretien et surtout suivre au jour le jour les revenus générés, avec la promesse d’un temps de retour sur investissement largement inférieur à celui de la durée de vie de l’engin. « Nous avions mis 100 vélos en vente pour notre première opération. Tout est parti en 30 minutes. Et immédiatement, on a vu chuter le nombre d’incidents liés au vandalisme, se souvient Paul-Adrien Cormerais. L’impact sur la collectivité n’est pas du tout le même quand c’est une multinationale qui vient louer des vélos et quand les habitants de la ville investissent eux-mêmes dans leurs solutions de mobilité partagée ». Accessoirement, le modèle de prévente permet de financer l’extension de la flotte sans avoir à lever de fonds.


A Bordeaux, la maintenance des 100 trottinettes électriques et des 300 vélos déployés dans la ville est assurée depuis un atelier situé dans l'enceinte de Darwin

« La contrepartie, c’est qu’on doit être irréprochable, il faut que le service soit fiable, pratique et rapide », commente le cofondateur. Après son premier vélo mécanique, le Wolf, Pony ajoute des trottinettes électriques à son offre, en se dirigeant directement vers un modèle parmi les plus robustes. La société lance en parallèle le développement d’un vélo électrique, intégralement conçu en interne. Elle imagine un vélo « cargo », doté d’un porte-bagage capable d’accueillir non seulement du chargement mais aussi un deuxième passager. « Il représente 1 an et demi de développement et un demi-million d’euros d’investissement », confie Paul-Adrien Cormerais. Essayé rapidement dans les rues de Bordeaux jeudi matin, le « double Pony » fait se retourner les passants, intrigués par la configuration double passager. Doté de deux vitesses automatiques et d’une assistance jusqu’à 25 km/h, il sera proposé à la vente aux alentours de 1800 euros. Les premiers exemplaires devraient arriver à Grenoble, puis à Paris, dans les prochaines semaines. Bordeaux en recevra aussi, mais plus tard.

Des ambitions métropolitaines

Pony, qui emploie une dizaine de personnes à Bordeaux pour sa R&D et son développement produit, a réalisé en fin d’année dernière un tour de table auprès de ses actionnaires historiques et du fonds néo-aquitain Aquiti Gestion, pour un montant de l’ordre de 2 millions d’euros, qui s’ajoutent donc aux 3 millions levés précédemment. « Cette levée de fonds nous permettra de financer l’achat de quelques véhicules, mais l’essentiel ira au développement du siège social, de la plateforme et de la R&D. Tout ce qui fait la valeur ! », explique Paul-Adrien Cormerais. Entre autres développements, Pony expérimente avec la startup bordelaise Gouach l’intégration de batteries lithium-ion « réparables », conçues pour permettre le remplacement unitaire d’une cellule en cas de défaillance. Leur durée de vie est ainsi significativement prolongée. 

La société, qui revendique 150.000 utilisateurs sur ses différents marchés mais ne communique pas son chiffre d'affaires, attend par ailleurs avec impatience l’appel d’offres qu’est censé lancer la métropole pour autoriser un ou plusieurs opérateurs à déployer leurs véhicules au-delà des frontières de Bordeaux. « C’est un appel d’offres structurant pour nous, on a besoin de travailler là où sont nos véhicules, et on sait qu’on a le service le plus performant, ce que soit en termes de fréquentation ou d’avis sur l’App Store », indique Paul-Adrien Cormerais. « Ca n'est pas le fait qu'on soit basé à Bordeaux qui doit faire la différence, on souhaite juste que l'appel d'offres intègre bien les notions de qualité de service et d’acceptation sans se limiter aux questions de nuisance et de sécurité comme l’ont fait d’autres villes », ajoute Clara Vaisse.

Pony
Basée à Angers et Bordeaux
Fondée en 2017
CA : n.c.
20 collaborateurs

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